ÉRIC CÉSARI, VICE-PRÉSIDENT DÉLÉGUÉ À L’IMMOBILIER D’ENTREPRISES ET AUX QUARTIERS D’AFFAIRES
« Notre mission : favoriser la cohérence des aménagements tertiaires »
Après un état des lieux de la place du tertiaire dans le Grand Paris, la Métropole essaiera d’œuvrer en faveur du rééquilibrage des aménagements sur son territoire, notamment en mettant en oeuvre à terme des règles nouvelles de « cohérence territoriale ». Une forme de « planification souple » rendue possible, affirme Éric Césari, vice-président délégué à l’immobilier d’entreprises et aux quartiers d’affaires, par « l’esprit de coopération » qui caractérise la jeune institution métropolitaine.
Comme chaque année, la Métropole du Grand Paris est présente au Mipim avec d’autres acteurs du Grand Paris. Quel est, en 2019, son message aux investisseurs ?
Premier point, simple mais essentiel : réaffirmer l’existence de cette Métropole qui conforte l’organisation de la zone dense. Une organisation jeune, certes, avec ses trois années de fonctionnement mais, désormais, plus solide. Une métropole qui est aussi un interlocuteur important pour les investisseurs, puisque nous avons organisé la libération de multiples terrains – plus de 3 millions de mètres carrés entre les deux phases de l’appel à projets Inventons ta Métropole – et ainsi rendu possible des aménagements importants dans la zone dense de la région, soit parce qu’ils sont massifs, soit parce qu’ils donnent un nouvel élan à des sites jusque là en difficulté. Leur « marque de fabrique » : mettre l’accent, toujours, sur l’innovation.
En matière d’aménagements tertiaires, quelle est la capacité à agir de la Métropole ?
Il faut d’abord noter que, sur le plan institutionnel, la priorité a toujours été plutôt donnée au logement. préoccupation majeure des pouvoirs publics. II en va autrement aujourd’hui : la Métropole est désormais un interlocuteur pertinent pour les acteurs de l’immobilier tertiaire. Elle a une mission d’incitation et de soutien, et elle a l’intention d’accompagner la construction et les développements tertiaires, sans se contenter de les laisser exclusivement au privé car il s’agit là, évidemment, d’activités majeures au plan économique et social. Bien sûr, ce sont les entreprises qui décident de leurs lieux d’implantation mais on peut multiplier les contacts, s’attacher à accompagner l’essor de nouveaux sites dans une zone dense qui doit lutter contre ses déséquilibres. Encore une fois, avec les appels à projets, on a réussi à mettre des coups de projecteur sur des quartiers et des communes qui souffraient d’un manque d’attractivité parfois très lourd, qu’il soit lié à des insuffisances des transports ou à des difficultés d’ordres social et économique.
Les appels à projets ont connu un grand succès. Ne court-on pas le risque. pourtant, d’un certain « pointillisme », d’un manque de coordination et de régulation ?
Le ScoT, qui porte bien son nom de « schéma de cohérence territoriale « , est justement là pour répondre à cette préoccupation ainsi que le Plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement.
On a déjà réussi a se mettre d’accord sur la première étape. Les documents stratégiques que les maires élaborent au sein de la Métropole structurent des obligations pour les opérateurs et constituent une forme souple de planification. C’est l’esprit de coopération qui caractérise la Métropole. Pour lutter contre les déséquilibres, on doit d’ores et déjà construire plusieurs mètres carrés de logements lorsque l’on construit un mètre carré de bureaux. C’est déjà un mode de régulation, mais il est insuffisant. Je réfléchis à une régulation positive qui faciliterait la mutation des bureaux obsolètes en logements par le biais, par exemple, d’une bourse des droits à construire. On en est encore à la réflexion mais il faut trouver des mécanismes qui incitent les opérateurs à transformer les bureaux lorsqu’ils sont frappés d’obsolescence et à construire du logement là où les territoires en ont besoin. En fait, l’immobilier tertiaire doit constamment se réinventer pour accompagner les mutations permanentes du travail.
La Défense a justement été un quartier pionnier. Est-il encore adapté à ces nouveaux besoins ?
La Défense a connu une vacance assez lourde il y a quelques années : il ya eu plus de to % de bureaux vides. C’était effectivement lié à un problème d’obsolescence et notamment au fait que certaines tours étaient devenues vraiment trop coûteuses en matière de consommation énergétique. Aujourd’hui, on en est à 5 % de bureaux vides, ce qui est très peu ; l’offre est bien adaptée à la demande. Un plan de relance avait été initié par Nicolas Sarkozy dès 2004 et cela a permis de remettre le quartier sur les rails. Là aussi, cependant, il faut être à l’écoute des entreprises et des opérateurs, connaître leurs besoins et leurs ambitions.
La conjoncture économique est cependant moins favorable, en France, que l’an dernier. Par ailleurs, le Grand Paris Express et le Charles-de-Gaulle Express pourraient connaître des retards. Des projets d’aménagement sont-ils menacés ?
Bien sur, tout cela est préoccupant. Le Grand Paris Express est capital pour que les projets urbains soient attractifs. Les retards entament la confiance, développent le doute, douchent les enthousiasmes. Voyez Antonypole, dans les Hauts-de-Seine.
En 2024, ce très vaste espace de 40 hectares doit être transformé, notamment autour de la future gare de la ligne 18 qui permettra de rejoindre l’aéroport d’Orly en trois minutes et la gare TGV de Massy en cinq minutes. On y prévoit des milliers de mètres carrés de logements, de bureaux, de commerces, un campus, un hôtel, une maison de santé, des équipements publics…
Le projet s’appuie évidemment sur la gare et les investisseurs ne sont prêts à s’engager que si, justement, elle arrive bel et bien ! Sinon, les retards s’accumulent, les avantages attendus en termes de fluidification des transports en commun existants sont également repoussés, les encombrements routiers restent ce qu’ils sont ou s’aggravent… Nous avons besoin d’informations précises, et elles manquent !
Source : Objectif Grand Paris
PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTINE MURRIS